De l’impropriété du « Migrant »

9 Nov 2018 | Connexion | 0 commentaires

CONNEXION. La lettre argumentaire PDF, rédigée par Jean-François Touzé et Franck Timmermans
Dans la bataille des mots et de la communication, je rappelais récemment combien notre Camp politique avait remporté de grandes victoires, notamment en s’appropriant le terme « d’immigration » ce qui équivalait par rebond à monopoliser tous les débats sur le sujet. Le Système a toutefois imaginé une parade, celle consistant à riposter en imposant sur le marché médiatique le terme de « Migrants ». Le mot présente des avantages bien qu’il comporte la même racine qu’immigration : « Migrant » est plus évocateur, l’imaginaire nous conduit d’abord vers des espèces animales, par définition menacées, qui quittent précipitamment leurs contrées d’origine à cause des méfaits de méchants humains ; car « Migrants » évoque évidemment les mêmes multitudes que « migrateurs » et donc que « migrations », et est dépourvu de la connotation péjorative ou suspecte que contient « l’immigration » sujette à des polémiques insoutenables !!! Du coup, « Migrants » incarne aussi des hordes vulnérables et malheureuses, innocentes victimes des aléas climatiques, politiques, économiques ou religieux. La « migration » porte en elle une symbolique forte, d’abord celle d’un droit naturel et vital que de nombreuses et sympathiques espèces animales usent depuis des temps immémoriaux pour se déplacer au fil des saisons par terre, par mer ou par les airs ; ensuite du droit dérivé de ces derniers à vaquer ainsi pour les humains « où ils devraient partout être libres d’aller sur cette planète », comme le martèle la Gauche, faisant fi des frontières, des reliefs, des pays et des libertés citoyennes d’autrui. Nous sommes là dans le délire de l’utopie révolutionnaire et internationaliste. Et la dernière symbolique y puise bien évidemment tous les exodes, toutes les expatriations, les persécutions et les transferts de populations. Là, l’imaginaire est vite saturé mais le public est immanquablement culpabilisé, et c’est bien là le seul résultat qui compte pour nos media ! Revenons maintenant aux définitions. « Migrant », juste après « migraine », n’apparaît pas dans le Littré : seul existe « Migrateur, qui émigre. », sans qu’animaux et humains soient dissociés dans son usage. Après vient « Migration : action de passer d’un pays dans un autre en parlant d’un peuple, de certaines espèces d’animaux », les deux sont liés encore ! Dans d’autres dictionnaires du XIXe et XXe siècle, même chose ; les Larousse universels successifs ignorent « Migrant », et ne connaissent que « Migrateur » et « Migration » mais qu’ils réservent aux animaux ce qui devient un peu discriminatoire… En 1926, dans son livre « L’immigration en France », qui fait autorité (Payot), l’expert Marcel Paon ne l’emploiera jamais et lui préférera toujours soit « l’Immigrant » soit « l’Etranger », plus global, pour ses analyses. Le grand Quillet de 1934, lui, ignore aussi tout du nom « Migrant » mais pas du participe présent puisqu’il signale un verbe rare « Migrer » du latin migrare : Se déplacer en parlant d’un liquide ou d’un fluide. Très évocateur ! Pour « Migration », il est formel dans sa définition : « ne se dit que d’un déplacement considérable de peuple, ex : les migrations des barbares »… C’est très important et il faut rester fidèle aux définitions. Un « immigré » reste toujours celui qui s’est introduit et installé dans un nouveau pays, et son contraire, « émigré », est pour désigner celui qui quitte son pays pour s’exiler ou s’établir ailleurs, usuels tous deux du point de vue du même pays. Un « immigrant » est, lui, toujours qualifié comme celui qui vient s’établir, qui fait la démarche de s’introduire, qui tente de rentrer dans un pays autre que sa patrie d’origine. Ce distinguo de situation entre « immigré » et « immigrant » n’a jamais changé et « immigrant » est bien le terme qu’il faudrait employer à la place du « migrant » des media. Je ne ratiocine ni ne pinaille car le préfixe latin « Im » est d’importance puisqu’il définit justement la notion d’« intrusion », et c’est là une nuance capitale qui explique le recours de nos adversaires à leur cher « migrant », beaucoup plus digeste ! D’autant qu’ils l’ont emprunté aux démographes et sociologues qui le réservaient jadis à leurs statistiques afin de réunir dans une même notion globale « immigrés » et « immigrants » dont l’usage différencié pour eux ne présentait pas d’intérêt ou qui était trop ethno-centré à leurs goûts… Le Migrant apparaît, lui, dans les études démographiques de l’Insee et autres organismes puisqu’il y qualifie surtout, et c’est intéressant, les mouvements de populations interrégionaux en France ; mais il sera détourné à la fin des années 90 et surtout à partir du début 2000 pour les raisons que l’on sait maintenant. Dans vos tracts, communiqués, interventions, je vous recommande donc de ne jamais utiliser le langage de l’adversaire et de bannir le terme « migrant » de votre vocabulaire, ne serait-ce que parce qu’il est inadapté. Utilisez le terme « IMMIGRANTS » pour qualifier ceux qui arrivent, ou qui tentent de le faire. L’adjectif « clandestins » est justifié également car il ne s’agit pas là de « passagers clandestins » étant donné qu’ils ont payé cher leur voyage aux passeurs mais de clandestins dans le sens de l’illégalité de leur démarche, compte tenu de l’absence de visas et du caractère équivoque des motivations comme des statuts. Les adjectifs « illégal », « irrégulier » sont possibles tout comme on peut parler « d’immigration frauduleuse » ou « clandestine ». Enfin, je ne résiste pas à rappeler que le dictionnaire des synonymes Le Robert, à « Migration », cite en 4e position le synonyme « invasion », mais suivre la jurisprudence sera préférable…

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